Un sondage publié en mars 2022 par une société spécialisée dans les problèmes alimentaires a récemment apporté d’intéressantes informations sur la perception du poids par la population française.
Le surpoids et l’obésité représentent un sujet de santé publique, ce dont les Français sont conscients. Pour autant, tout discours de sensibilisation sur ce sujet comporte le risque de déclencher une accusation d’hostilité aux personnes obèses (grossophobie, discrimination liée au physique, etc.). Cette sensibilisation est pourtant urgente car tous les indicateurs le montrent : la population française suit la tendance américaine à 25 ans de distance : aux USA, on comptait 17 % de personnes obèses il y a 25 ans. Ce pourcentage est monté à 35 % en 2020.
En France, le nombre de personnes atteintes d’obésité a doublé depuis 1997, passant de 8 à 17 % de la population. Si l’on comptabilise les personnes obèses et les personnes en surpoids, c’est 1 Français sur 2 qui est concerné !
La courbe américaine précède la courbe française, mais pour les deux pays cette évolution est inquiétante : la pathologie de l’obésité est en constante augmentation.
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, il s’agit même d’une épidémie, dans le sens où les comportements favorisant l’obésité sont de plus en plus répandus et gagnent du terrain de plus en plus vite.
Malgré ces chiffres et ces constats, des résistances psychologiques sont constatées parmi les Français : d’une part, environ 40% des Français ne considèrent pas réellement l’obésité comme une maladie mais plutôt comme le résultat d’une mauvaise hygiène de vie ; d’autre part, pour près de 80% des Français, une personne obèse est quelqu’un qui manque de volonté pour réguler son mode de vie.
Enfin, nombre de Français médicalement obèses (présentant un IMC correspondant à cette qualification) se perçoivent eux-mêmes comme simplement en surpoids…
Notre société est également écartelée entre deux injonctions opposées : respecter le corps de toute personne et ne pas blâmer les apparences physiques, et par ailleurs répondre à des canons de beauté qui impliquent une minceur musclée et une silhouette irréprochable.
Dans ce contexte, toute sensibilisation aux risques induis par l’obésité est soupçonnée de mettre en cause les obèses pour leur apparence physique ou leur présumée faiblesse de caractère : il est temps de se demander si cette insuffisance de prévention ne contribue pas à son tour à l’épidémie.
Communiquons sans jugement sur les causes du surpoids et de l’obésité, qui surviennent souvent dès l’enfance. Tout parent doit être conscient des fondamentaux de l’alimentation et des règles simples d’hygiènes de vie permettant d’éviter la prise de poids importante.
Les conséquences de l’obésité vont bien au-delà de la silhouette et d’une apparence physique que chacun reste libre d’apprécier. Les conséquences les plus graves de l’obésité sont les pathologies qui en découlent inévitablement et réduisent notablement l’espérance et la qualité de vie.
A titre de comparaison, le tabac et l’alcool sont perçus par les Français comme des comportements mortels, bien plus dangereux que l’obésité, alors qu’en réalité l’obésité est à elle seule responsable de plus de morts chaque année que le tabac et l’alcool réunis (180.000 morts par an liées à l’obésité – Source Ligue contre l’obésité).
Avant même de parler de décès, la qualité de vie est systématiquement impactée en cas d’obésité, et nombre de problème surviennent dès la jeunesse : cholestérol, essoufflement, problèmes cardiaques, articulaires, apnée du sommeil….
En outre, et comme cela a été rappelé lors de la crise sanitaire, l’obésité constitue un facteur aggravant en cas d’autre pathologie, et complique les traitements et les interventions chirurgicales, ainsi que les grossesses et accouchements.
Il est donc impératif de parler des causes multiples de l’obésité, et de ses conséquences, pour aborder les moyens de lutter contre.
Les facteurs favorisant surpoids et obésité sont mieux connus : la génétique, les conditions de vie, des dysfonctionnements hormonaux et le mode alimentaire, mais aussi l’environnement familial.
Certaines causalités et notions de diététique doivent être mises en évidence pour aider chacun à une prise de conscience : il ne suffit pas de conseiller de manger mieux, si l’on n’explique pas en quoi ça consiste, et quelles erreurs éviter.
Il n’existe aucune méthode miracle, sauf une certaine hygiène de vie : cela implique non pas un régime drastique, mais une nouvelle approche de l’alimentation impliquant une réduction des graisses et sucres. Cela n’empêche ni la saveur, ni la satiété.
Il est également important d’aider une personne obèse à admettre que les recettes magiques n’existent pas : pilules, régimes mono-aliment, crèmes, laxatifs ou diurétiques ou autres… Au mieux ces formules ne fonctionnent pas, au pire elles sont dangereuses pour l’organisme.
Seul un travail de fond et régulier sur l’alimentation et sa perception peut avoir un résultat probant.
Quelles sont les solutions qui peuvent aider à enclencher un rééquilibrage alimentaire ?
L’abonnement à une société de portage de plats peut fonctionner pour un démarrage, mais implique autant de volonté qu’une autre méthode. Les repas sont préparés et livrés, équilibrés et assez gouteux, et doivent représenter un juste apport quotidien alimentaire. Mais sans accompagnement ou coaching, il sera difficile sur le moyen terme de ne pas faire d’écart et ajouter des compléments aux plateaux livrés !
Cela peut néanmoins permettre une prise de conscience sur les quantités ou les recettes possibles, et une phase d’amorce.
L’autre solution, plus radicale, est le recours à la chirurgie bariatrique.
L’avis du médecin
Nous avons demandé son avis au docteur Allujami, chirurgien bariatrique dans l’Essonne sur ces nouveaux programmes alimentaires.
Que pensez-vous des solutions de rééquilibrage alimentaire par portage de repas qui se développent actuellement en France ?
Incontestablement, il s’agit d’une approche intéressante comparée aux régimes carencés destinés à faire perdre rapidement du poids qui finissent presque toujours sur des échecs. Non seulement ces régimes « miracles » nécessitent une grande volonté mais ils peuvent être parfois inadaptés à l’état de santé des patients.
Perdre du poids sainement passe évidemment par mieux se nourrir en adoptant une alimentation équilibrée et en diminuant les apports au fil des jours. C’est l’objectif des programmes de rééquilibrage alimentaire que d’apprendre à manger correctement ou à cuisiner sainement mais cela peut prendre un certain temps et nécessite de l’auto discipline. C’est pourquoi, même avec ces solutions plus naturelles et respectueuses du métabolisme humain, il subsiste un taux d’échec non négligeable.
Cette solution peut-elle remplacer la chirurgie de l’obésité ?
A partir du moment où toutes les solutions de perte de poids ont été essayées sans succès, y compris le rééquilibrage alimentaire, le dernier recours reste la chirurgie. Elle concerne des personnes en situation de forte obésité voire d’obésité morbide pour lesquelles leur santé est en danger et qui ont besoin d’une solution de perte de poids assez rapide et assez importante. Seule la chirurgie va permettre de modifier l’estomac afin que le patient ressente une réelle satiété et ingère beaucoup moins d’aliments.
Les pertes de poids de plusieurs dizaines de kilos restent difficiles à obtenir avec de simples programmes de rééquilibrage alimentaire. Mais ceux-ci peuvent constituer un complément naturel en post opératoire d’une chirurgie bariatrique, ce qui correspond d’ailleurs souvent au suivi de santé que nous proposons au patient opéré. Afin d’éviter les récidives, les patients opérés bénéficient d’un suivi sur le long terme constitué d’une équipe pluridisciplinaire composée de nutritionnistes et de psychologues pour conjuguer les différentes dimensions de la réussite du traitement : adopter définitivement une alimentation équilibrée, traiter les addictions alimentaires, faire un peu d’exercice…